21/04/2013

L'eau et l'assainissement cherchent une place légitime dans l'agenda post-2015

Lorsque
l'Assemblée générale de l'ONU adoptait à l'unanimité les Objectifs du
millénaire pour le développement – OMD en 2000, l'eau et
l'assainissement étaient réduits à un sous-texte et n’ont pas constitué
un objectif à part entière comparativement à la réduction de la pauvreté
et la faim. Aujourd'hui, alors que les Nations unies commencent le
processus d'élaboration d'un nouvel ensemble d'Objectifs de
développement durable – ODD, pour leur agenda post-2015, il y a une
campagne visant à souligner l'importance de l'eau et de
l'assainissement, afin de hisser l’eau et l’assainissement au rang
d’objectif à part entière.

L'ambassadeur de Hongrie, Csaba Korosi,
dont le gouvernement accueillera en octobre un sommet international sur
l'eau à Budapest, la capitale, déclare: "Les objectifs de
développement durable pour l'eau devraient être conçus de manière à
éviter la crise imminente mondiale de l'eau."
S'adressant aux
journalistes, le représentant permanent de la Hongrie aux Nations unies,
rappelle que si les ressources en eau sont restées pratiquement
inchangées depuis près de 1 000 ans, le nombre d'utilisateurs a depuis
lors augmenté d'environ 8 000 fois. Avec la production alimentaire
mondiale prévue pour augmenter de 80 % d'ici à 2030, Korosi a affirmé
que 2,5 milliards de personnes vivront très bientôt dans des zones de
pénurie d'eau. S'adressant à la session thématique spéciale de
l'Assemblée générale sur l'eau et les catastrophes, le vice-secrétaire
général, Jan Eliasson, a été catégorique: "Nous devons trouver de
solution à la honte mondiale de milliers de personnes qui meurent chaque
jour dans des situations d'urgence silencieuses provoquées par l'eau
souillée et un mauvais assainissement."

Le thème du sommet de
Budapest sur l'eau, prévu pour début octobre, sera "Le rôle de l'eau et
de l'assainissement dans l'agenda mondial de développement durable". Le
sommet sera précédé d'une Conférence internationale de haut niveau sur
la coopération dans le domaine de l'eau, au Tadjikistan en août, et la
Semaine mondiale de l'eau, parrainée par l'Institut international de
l'eau de Stockholm – SIWI, en Suède en septembre, plus plusieurs autres
conférences et sommets régionaux en Asie, Afrique et en Amérique latine.
Ces réunions se tiennent à un moment où l'Assemblée générale a déclaré
2013 l'Année internationale de la coopération dans le domaine de l'eau.
Torgny Holmgren, directeur exécutif du SIWI, rappelle que dans une
enquête sur les États membres des Nations unies dans les domaines
prioritaires pour les objectifs post-2015, l'alimentation, l'eau et
l'énergie constituaient "un premier trio distinct". Pour une
deuxième année consécutive, a-t-il souligné, la crise
d'approvisionnement en eau a été également parmi les trois principaux
risques mondiaux dans l'enquête annuelle menée par le Forum économique
mondial en Suisse. "Nous voyons également la façon dont les questions
de l'eau sont priorisées par les acteurs en dehors de la communauté
traditionnelle de l'eau, provenant plus particulièrement des secteurs de
l'alimentation et de l'énergie"
, a indiqué Holmgren, un ancien
ambassadeur et directeur du département de la politique du développement
au ministère suédois des Affaires étrangères. Au milieu de tout cela,
a-t-il dit, d'importantes discussions et réflexions sont en cours pour
développer de nouvelles ambitions qui soutiendront le mouvement vers un
monde durable et désirable pour tous dans le soi-disant agenda de
développement post-2015. "Je suis optimiste que la conscience
retrouvée de l'importance de l'eau sera transformée en de vastes
objectifs sur l'eau comme une ressource, comme un droit et comme un
service"
, a expliqué Holmgren.

John Sauer, directeur des
relations extérieures de l'ONG Water for People, estime que les Nations
unies ont pris une mesure importante en faisant de l'eau et de
l'assainissement un droit humain à travers une résolution (64/292) de
l'Assemblée générale en 2010. Malgré cet effort, a-t-il dit, leur
travail visant à assurer un service d'eau et d'assainissement durable et
abordable doit évoluer et innover pour répondre à l'immensité de ce
défi. "Comme l'ONU déplace l'attention vers l'objectif post-OMD d'une
couverture universelle, le contrôle devrait changer pour aller vers la
fourniture des services en cours"
, préconise-t-il. Cela est essentiel pour éviter le grand nombre de projets qui échouent actuellement, a noté Sauer. "Cela
signifie qu'il faut regarder au-delà des projets financés, et des
bénéficiaires atteints, au lieu de considérer le renforcement
systématique des capacités au sein du gouvernement, de la société civile
et des institutions du secteur privé. Cela signifie aussi la création
de partenariats plus solides"
, a-t-il souligné. "Si l'ONU pouvait
mieux démontrer son impact, par exemple, en utilisant des indicateurs
pour montrer les capacités renforcées, ceci serait un progrès dans la
bonne direction."
Ensemble avec des ONG, les Nations-unies doivent
saisir l'occasion et accroître la transparence pour révéler le véritable
impact de leurs activités, a-t-il ajouté.

Interrogé sur le rôle des
organisations internationales dans la résolution de la crise mondiale
imminente de l'eau, Richard Greenly, président de l'ONG Water4, avait
une opinion différente. Selon lui, les organisations comme les Nations
unies auront toujours peu ou pas d'effet sur la crise croissante de
l'eau et de l'assainissement. "Mais ce n'est pas par manque de très bonnes intentions ou de beaucoup d'efforts", a-t-il indiqué. "Le
fait est que nous ne pouvons pas donner ou accorder à un autre pays la
prospérité et la santé (…) Cela n'a jamais marché dans l'histoire du
monde et cela ne marchera jamais dans la crise de l'eau et de
l'assainissement. Tous les pays développés ont payé pour leur propre
développement de l'eau en développant des entreprises dans le secteur
(…) Le commerce est le moyen de sortir de la pauvreté et même si l'ONU
est bien intentionnée, le développement durable de l'eau doit être mis
dans les mains des citoyens locaux pour résoudre leurs propres problèmes
d'eau."

Thalif Deen, IPS – AllAfrica 28-03-2013